La question de la création d’une SCI revient régulièrement lors de mes rendez-vous clients. Notamment chez ceux qui souhaitent investir dans l’immobilier ou qui détiennent déjà un petit parc immobilier à optimiser fiscalement ou à transmettre. En effet, la majorité des personnes pensent (et beaucoup de personnes véhiculent cette idée sur le net) que la création d’une SCI permettra de faciliter la gestion, la transmission ou la fiscalité immobilière.
Si cela est vrai dans certains cas, cela peut être aussi une grave erreur dans la majorité des situations, notamment si le régime d’imposition n’est pas adéquat. Nous voyons ensemble comment choisir le régime d’imposition de sa société civile immobilière (SCI), en fonction de votre fiscalité mais surtout de votre situation et de vos objectifs patrimoniaux.
Pourquoi acheter au travers d’une SCI ?
Une SCI est une société civile immobilière. Elle permet à des investisseurs (de la même famille ou non) de se réunir et d’acheter de l’immobilier en commun.
Plus généralement, la société civile va :
- Faciliter la gestion : on désigne un gérant qui va s’occuper de la gestion du parc immobilier
- Permettre une transmission sur-mesure : vous pouvez transmettre dans le temps vos parts de SCI à vos enfants par exemple. Vous pourrez ainsi jour sur l’abattement sur les frais de transmission.
- Contourner le principe de l’indivision : acheter à plusieurs, pourquoi pas tant que les acquéreurs s’entendent bien. Mais le jour où un désaccord survient ? Il suffit que l’un des investisseurs formule le souhait de revendre pour contraindre tous les autres acquéreurs à se séparer du bien (et souvent dans de mauvaises conditions financières). Acheter au travers d’une SCI protège le patrimoine immobilier puisque le bien appartient à la société et non aux acquéreurs. L’associé devra revendre ses parts s’il souhaite sortir de la SCI. Une SCI ne peut donc pas être créée par une seule personne (physique ou morale), vous devez être au moins deux (même si cela est très facile à contourner en faisant entrer une société holding parmi les associés).
- Augmenter votre capacité d’investissement : vous faites le choix d’acheter à crédit ? Excellente idée pour augmenter votre patrimoine à terme ! A plusieurs, on va plus loin, c’est bien connu. La SCI vous permet ainsi d’accroître votre capacité d’emprunt.
Et enfin, la SCI vous permet de profiter de deux types d’imposition :
- L’imposition à l’IR (impôt sur le revenu), exactement comme si vous déteniez en direct le bien immobilier.
- L’imposition à l’IS (impôt sur les sociétés) pour profiter d’une tranche d’imposition plus faible (éventuellement) mais surtout de l’amortissement comptable du patrimoine immobilier.
Et c’est notamment l’imposition à l’IS qui peut intéresser de nombreux investisseurs.
La SCI à l’IR comme outil de transmission
La SCI à l’impôt sur les revenus est dite fiscalement transparente. Par conséquent, la fiscalité des associés est identique qu’ils soient propriétaire en nom propre du bien immobilier ou via SCI à l’IR.
Il n’existe donc aucun bénéfice fiscal à être actionnaire d’une SCI à l’IR par rapport à une acquisition en direct du bien immobilier.
La majorité des SCI à l’IR exploitent des biens immobiliers en location nue et génèrent donc des revenus fonciers. Chaque associé devra donc appliquer sa quote-part aux revenus fonciers pour déterminer le montant à déclarer à l’administration fiscale. En cas de déficit foncier, les associés pourront imputer de leur revenu global la part du déficit foncier réalisé.
Comme pour n’importe quel investissement locatif nu, vous avez le choix entre la déclaration au micro-foncier (abattement de 30% des loyers) ou au réel (déclaration des revenus avec le formulaire 2044).
A la revente, la fiscalité est identique à la détention de l’immeuble en nom propre. L’associé verra l’imposition (et les contributions sociales) de sa plus-value abattue selon la durée de détention (abattement total au bout de 30 ans).
Au-delà de la fiscalité, l’avantage principal de la SCI à l’IR est de contourner les inconvénients de l’indivision. En effet, lorsque plusieurs personnes veulent s’associer pour acquérir un bien immobilier, elles recourent par défaut à l’indivision. Dans ce cas, l’immeuble ne pouvant être « divisé » physiquement, il est possédé comme « un tout ». Cela signifie qu’en cas de revente par l’un des indivisaires, la revente du bien en totalité est obligatoire.
Dans un montage de SCI à l’impôt sur les revenus, c’est la société qui détient l’immeuble et les associés ont des parts de ladite société. Par conséquent, si l’un des associés souhaite revendre, ce sont ses propres parts qu’il devra céder à un tiers.
Dans le cas d’une transmission (donation ou succession), le montage de la SCI à l’IR est très intéressant puisqu’il permet d’une part, de commencer à céder une partie de son patrimoine immobilier à ses futurs héritiers. D’autre part, le parc immobilier ne sera pas en indivision parmi les héritiers. Le patrimoine immobilier familial sera donc mieux protégé d’une éventuelle dilapidation lors de la succession.
Enfin, la comptabilité d’une SCI à l’IR n’est pas obligatoire mais les formalités d’une société devront être respectées (assemblée générale etc.).
Vous ne devez donc pas ignorer les coûts et le temps lié à la gestion d’un bien au travers d’une SCI (qu’elle soit à l’IR ou à l’IS d’ailleurs).
La SCI à l’IS pour optimiser sa fiscalité
La SCI à l’IS présente des avantages fiscaux au premier abord. La société est fiscalement opaque car disjointe du patrimoine des associés contrairement à la SCI à l’IR.
Le premier avantage est de pouvoir amortir comptablement le bien immobilier (comme c’est le cas de l’amortissement avec le statut du LMNP). Cela veut dire qu’en phase d’exploitation, les charges de la société vont augmenter et le résultat comptable sera donc amoindri. La fiscalité en sera donc réduite.
Le taux d’imposition est possiblement plus faible que celui de l’impôt sur le revenu. Les 38 120 premiers euros sont imposés à 15% (puis à 33,33%). Notez qu’il est possible de déduire fiscalement la rémunération du gérant de la SCI.
En revanche, les amortissements ne seront pas réintégrés à la valeur de cession (comme c’est le cas du statut LMNP). L’assiette taxable des plus-value sera donc fortement augmenté. De plus, vous ne pourrez pas bénéficier de l’abattement de l’impôt sur les plus-value selon la durée de détention. Ce que vous avez gagné d’une part (lors de l’exploitation du bien immobilier), vous le perdez de l’autre (à la sortie).
La fiscalité reste basse tant que vous laissez les bénéfices dans la société. Si vous souhaitez vous rémunérer en tant qu’associé, vous allez devoir distribuer un revenu sous forme de dividende. Dans ce cas, vous serez fiscalisé à la flat tax de 30% (ou à votre TMI et contributions sociales si plus avantageux après abattement de 40% du montant des dividendes).
Vous pouvez également choisir de vos verser une rémunération, soumise aux charges sociales (30% à 40% de la rémunération) sur laquelle vous devrez payer des impôts sur le revenu.
Bien que l’appel à un expert-comptable n’est pas obligatoire, vous devez tenir une comptabilité en suivant le plan comptable général. Vous devrez, en outre, produit le bilan, le compte de résultat et la récapitulation des amortissements, immobilisations, provisions, créances et dettes.
Si vous n’êtes pas vous-même comptable, le recours à un cabinet comptable est selon moi indispensable. Ce qui alourdi les coûts fixe de votre société (entre 1 000€ et 2 000€ par an).
Si la SCI à l’IS peut vous paraître séduisante à ce stade, nous allons parler à présent de l’inconvénient principal (malheureusement, il n’y a pas de magie…) : les impôts sur les plus-value.
Si vous vous souvenez bien de l’avantage principal de la SCI à l’IS (d’un point de vue fiscal), c’est son amortissement qui permet de créer des charges annuelles supplémentaires (non décaissées) et baissent ainsi le résultat fiscal taxable.
Cependant, lors de la revente, vous créez un écart entre la valeur nette comptable du bien immobilier inscrit au bilan de la société civile (valeur nette comptable = valeur d’achat – amortissements cumulés). C’est pourtant sur cette assiette que le fisc va calculer l’impôt sur les sociétés. Au final, les amortissements qui vous ont permit de diminuer la fiscalité lors de la gestion de votre bien se retournent contre vous au moment de la revente.
Et contrairement à un bien acquis en direct, impossible de bénéficier d’abattement pour durée de détention.
L’option de la SCI à l’IS
L’impôt sur les sociétés est un choix fiscal optionnel. Par défaut, la SCI est soumise à l’IR. Cela signifie que les détenteurs des parts sociales de la SCI sont libres ou non de choisir l’imposition à l’IS. Ce choix est irrévocable.
En revanche, il est couramment admis que si les recettes commerciales de la société dépassent 10% du chiffre d’affaires total, la SCI doit être déclarée à l’IS.
Utiliser une SCI pour exploiter des appartements en meublé (activité commerciale) implique aussi le choix de l’option à l’IS. En découle donc toutes les conséquences fiscales de la SCI à l’IS.
Apporter un bien dans une SCI
Si vous détenez déjà un bien immobilier et que vous souhaitez l’apporter à une société civile (concrètement, que ce soit la société et plus vous qui détenez le bien), cela est possible.
Vous pouvez notamment faire ce choix pour des raisons fiscales mais aussi de transmission ou de gestion.
En apportant un bien à la société civile, vous allez devoir remettre les « compteurs à zéro » :
- Vous devrez vous acquitter en nom propre de l’impôt sur la plus-value si celui-ci est dû. En effet, vous vendez littéralement votre bien à votre société (même si cela est transparent pour vous puisque vous détenez vous-même la société)
- Vous perdez ainsi l’antériorité fiscale des abattements. En cas de revente du bien hébergé dans une société civile immobilière imposée à l’impôt sur le revenu, vous devrez repartir de l’année de transmission du bien à la société
- Vous devrez vous acquitter de frais de mutation : et oui, vous avez transmis votre bien à votre société, l’Etat (et votre notaire) vont prendre leur part… Ces frais sont différent selon l’option fiscale de votre SCI, interrogez un bon notaire en amont pour chiffrer ces frais de mutation (et les émoluments de ce dernier)
Je vous donne quelques points de vigilance :
- Le fisc est très regardant sur ce type de transaction. Comme vous l’aurez compris, il peut être tentant de prendre quelques libertés sur le prix d’achat retenu lorsque l’on fait une vente à soit même. N’hésitez pas à demander plusieurs estimations d’agences immobilières pour surveiller vos arrières.
- Si vote bien en propre était exploité en meublé, vous devrez obligatoirement passer à l’IS. Certains notaires ne sont pas au fait de cette obligation.
- Comme dit plus haut, les coûts peuvent être importants : fais de mutation, émoluments du notaire, rédaction des statuts, PV d’assemblée générale, frais de comptabilité… Ne faites ce transfert que si le gain est sans équivoque !
Dans quels cas investir avec une SCI à l’IS ?
La SCI à l’impôt sur les sociétés peut être une excellente idée dans les cas suivants :
- Investissement à très long terme : car plus l’horizon est élevé, plus l’investisseur est fiscalisé ! Il est donc préférable selon moi d’avoir un horizon d’investissement tellement élevé que le bien finisse par être totalement amorti. Les SCI à l’IS peuvent être vues comme des structures « familiales » qui génèrent des loyers réinvestis par la suite dans d’autres actifs (placements financiers ou immobilier par exemple). La société sera ensuite transmise aux enfants.
- Objectif de capitalisation : les dividendes étant taxés, il faut conserver les revenus générés dans la société, voire les réinvestir dans une nouvelle acquisition (comme dit plus haut). A terme, vous pourrez sortir des revenus de la société mais uniquement pour financer votre train de vie (rentes). N’utilisez pas ce type de société pour revendre tout le parc immobilier et récupérer un gros capital in-fine. Comme expliqué plus haut, la fiscalité serait confiscatoire.
- Faible potentiel de revalorisation du bien immobilier : les plus-value sont fortement fiscalisées. Vous serez donc pénalisé en investissant dans un bien immobilier dont la valeur augmente régulièrement. Préférez donc les bâtiments industriels ou les immeubles dans des secteurs ruraux par exemple. Vous éviterez ainsi un effet ciseaux assez violent (baisse de la valeur nette comptable et hausse du prix de revente chaque année !).
Calculer la rentabilité d’un investissement en SCI à l’IS
Si vous vous demandez si un investissement en SCI fiscalité à l’IS est la meilleure chose pour vous, vous devez calculer la fiscalité et la comparer avec les autres régimes qui s’offrent à vous :
- La SCI à l’IR si vous souhaitez bénéficier des avantages de la société civile en terme de gestion de transmission (pas de meublé dans ce cas)
- Le LMNP au micro-BIC ou BIC réel
- Le LMP
- Le foncier au micro ou réel (déficit foncier)
Les calculs étant complexes car il dépendent de votre situation fiscale propre (taux marginal d’imposition, quotient familial etc.), je vous conseille de consulter mon simulateur de rentabilité immobilière. Il dispose d’une option de simulation de SCI à l’IS pour calculer la rentabilité et la fiscalité.